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Et si c'était une relation d'emprise ?

Dernière mise à jour : il y a 6 jours

Quand l’amour confond, étouffe et vide peu à peu de soi.

Dans certaines relations amoureuses, l’amour ne fait plus grandir, il rend plus petit. Le lien, au lieu de soutenir, enferme. Et pourtant, on reste. On s’attache. On espère. On doute. On se perd. Parfois, ce mal-être porte un nom : l’emprise.

Ce n'est pas de l'amour quand la relation oscille entre violence et tendresse, entre promesse et trahison, entre pouvoir et soumission, entre espoir et désillusion. Explications.


Couple main dans la main en confiance
"Reconnaître l’emprise est un acte de courage. Demander de l’aide est un acte de vie." Johanna Quérin



Qu’est-ce qu'une relation d'emprise ?


L’emprise est une domination intellectuelle, affective, psychologique qu’exerce une personne sur une autre. La notion d’emprise a été introduite dans le droit français par la loi du 30 juillet 2020, qui vise à protéger les victimes de violences conjugales.


L’emprise, c’est un pouvoir invisible mais total, exercé sur l’autre sans qu’il ou elle en ait conscience. C’est une domination qui ne dit pas son nom, et qui enferme dans une relation où la peur, la culpabilité et la honte remplacent la confiance et la sécurité.

Souvent, les victimes sous emprise ne savent pas qu’elles le sont. Elles pensent qu’elles sont trop sensibles, pas assez aimantes, trop présentes. Elles se remettent en question, cherchent à comprendre ce qu’elles ont mal fait.


En réalité, elles sont sous l’influence d’un cycle de violences psychologiques.



1. La phase de tensions : l’atmosphère se charge


Stratégies de l’auteur·e :Les tensions s’installent souvent de manière insidieuse. L’auteur·e de l’emprise modifie subtilement l’ambiance relationnelle : gestes brusques, silences pesants, irritabilité inexpliquée. Il ou elle devient critique, imprévisible, parfois menaçant·e, sans que les menaces ne soient explicitement formulées. Cela crée un climat pesant, oppressant. Les non-dits deviennent des armes. Tout est fait pour déséquilibrer la victime sans qu’elle puisse mettre des mots sur ce qu’elle ressent.


Effets sur la victime :La victime entre dans un état d’alerte permanent. Elle ressent de l’inquiétude sans parvenir à en identifier clairement la source. Elle anticipe, surveille, se fait petite, tente de désamorcer les tensions. Elle ajuste son comportement, croit encore qu’elle peut prévenir la tempête. Elle commence à se déconnecter de ses besoins pour se centrer uniquement sur l’autre. C’est souvent ici que commence l’épuisement psychique, émotionnel, relationnel.


2. La phase de crise : la violence éclate


Stratégies de l’auteur·e :C’est le moment où l’auteur·e affirme brutalement son pouvoir. Cette crise peut prendre des formes multiples : cris, insultes, contrôle excessif, isolement, jalousie, violences physiques, sexuelles ou économiques. L’autre perd toute contenance, exprime une colère démesurée ou exerce un contrôle glaçant. Tout ce qui précède – la peur, les silences, la tension – trouve ici une “sortie”. Mais ce n’est pas une explosion ponctuelle : c’est une mise au pas. Une domination exercée sous couvert d’émotion.


Effets sur la victime :La victime est sidérée, prise de court, désorientée. Elle peut ressentir de l’humiliation, une immense tristesse, un sentiment d’injustice, une peur paralysante. La crise la plonge dans un état de confusion, de choc. Son système nerveux peut littéralement se figer. Dans certains cas, elle ne se souvient même plus précisément de ce qui s’est dit ou passé : c’est un mécanisme de protection face à la violence. Elle perd ses repères et commence à douter de sa propre perception de la réalité.


3. La phase de justification : la distorsion du réel


Stratégies de l’auteur·e :La violence est aussitôt justifiée, minimisée, renvoyée à un contexte ou à une faute supposée de la victime : “Je suis fatigué”, “Tu m’as provoqué”, “C’est à cause de mon enfance”, “Tu es trop sensible”. L’auteur·e renverse les rôles, crée de la confusion morale. Il ou elle peut même passer pour vulnérable, blessé·e, comme s’il ou elle était victime de ses propres démons. Cette stratégie est une manipulation : elle désarme, déroute, et empêche toute prise de conscience claire de l’abus.

Effets sur la victime :La victime entre dans une spirale de doute. Elle remet en question ses réactions, ses ressentis, son jugement. Elle culpabilise, croit qu’elle a mal agi, qu’elle est responsable. Elle modifie alors son comportement pour “éviter que ça recommence”, croyant encore pouvoir sauver la relation ou aider l’autre à aller mieux. C’est ici que s’installe le piège psychologique profond de l’emprise : quand la victime intègre qu’elle est en partie responsable de ce qu’elle subit.


4. La phase de lune de miel : le retour de l’illusion


Stratégies de l’auteur·e : La personne qui exerce l'emprise devient à nouveau douce, aimante, attentionnée. Elle présente des excuses, promet que “ça ne se reproduira plus”, parle de consulter, de changer. On offre des cadeaux, des gestes tendres, des souvenirs communs. On évoque l’amour, les bons moments. L’agresseur·e cherche à reconquérir. La réalité violente est effacée sous une couche d’affection. L’auteur·e restaure son image : celle du “bon partenaire” que la victime a aimé au début.


Effets sur la victime : La victime éprouve du soulagement. Elle a l’impression de retrouver la personne qu’elle aime, celle qui a su l’émouvoir, l’attendrir. Elle ressent un espoir immense que tout puisse s’arranger. Elle peut voir dans ces moments une preuve que l’autre l’aime. Le lien traumatique se renforce : plus la violence est niée, plus l’attachement à l’auteur·e grandit. Elle se persuade que cette fois, ce sera différent. Elle pardonne. Et le cycle recommence.


Comprendre le cycle, c’est voir le piège se refermer

Ce cycle peut se répéter des dizaines de fois, parfois sur plusieurs années. Chaque phase renforce la suivante. Chaque justification renforce la culpabilité. Chaque lune de miel renforce l’illusion. Et chaque crise, l’effondrement. C’est un engrenage qui use, détruit, isole. Ce n’est pas un manque de volonté qui empêche de partir, mais un conditionnement affectif et psychologique profond, souvent invisible à l’extérieur.


Se faire aider : un accompagnement est nécessaire

Sortir d’une relation d’emprise n’est ni simple, ni rapide. Il ne suffit pas d’ouvrir les yeux ou de « reprendre le pouvoir ». Il s’agit d’un chemin de reconstruction profond, parfois long, qui demande du temps, du soutien, et souvent, plusieurs tentatives.


Car l’auteur·e de l’emprise a, au fil du temps, brisé la confiance de la victime en elle-même, en ses ressentis, en son droit d’exister. Pour se réapproprier son histoire, ses repères, ses limites, la victime a besoin d’être accompagnée dans un cadre bienveillant, sécurisant, non jugeant.


Voici quelques ressources précieuses :

  • Des professionnel·le·s formé·e·s à la violence conjugale : psychologues, thérapeutes de couple, conseiller conjugaux et familiaux médiateurs spécialisés.

  • Des associations spécialisées :



Personne ne devrait rester seule face à la violence, même quand elle est invisible. Reconnaître l’emprise est un acte de courage. Demander de l’aide est un acte de vie. Vous pouvez me contacter par message à hello@johannaquerin.com ou prendre directement rendez-vous.



Bibliographie

  • Pervers narcissique : comprendre l’emprise pour s’en libérer, Johanna Rozenblum




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